mercredi 17 août 2016

De Sienne à Bolsena

Rien ne remplace la fraîcheur d'un lac. Je passerai la nuit à ses rives. Le camping sur un lac n'a rien à voir avec ce qu'on rencontre au bord au bord de la mer. Je passe une délicieuse nuit, à l'abri de la chaleur.

J'ai donc quitté Sienne pour Rome, puisque tous les chemins y mènent.En fait, comme le fait remarquer Paolo Rumiz, c'est pas que tous les chemins mènent à Rome, c'est plutôt que Rome a construit tous les chemins, non pas pour qu'on vienne à elle, mais pour que les Romains, ses armées, ses marchands puissent aller partout. Ainsi Rome a-t-elle créé l'Etat centralisé.
Reste que Rome ne se fait pas en un jour à partir de Sienne. C'est peut-être tant mieux, d'ailleurs. Il y a au Nord de Rome quelques lacs dont je gardais de délicieux souvenirs. Trasimène, lac historique, où Hannibal s'est imposé face aux Romains, Bracciano et Bolsena. Malgré tout l'intérêt que je porte à Hannibal, et bien que je sache que la distance entre Sienne et Rome allaient au delà de mes capacités en un jour, j'optai pour la ligne la plus droite, la Via Cassia, c'est à dire la route de Cassius.  
Bien entendu, dans un paysage de collines, celui-là même qui permet qu'il y ait des lacs, la ligne la plus droite n'est pas si droite. Ça l'était d'autant moins que la Via Cassia, devenue depuis SR2, était indiquée comme coupée. Pendant que je me demandais si j'allais mépriser l'interdiction de suivre ma voie, je vis comme un mirage, un cyclocampeur à l'arrêt au pied de la déviation déployant sa carte routière. 
Il partage mes interrogations, mais il a un temps d'avance sur moi. Il commence à faire très chaud, et le collègue n'a pas vraiment envie de se taper une inutile difficulté supplémentaire. Il faut savoir si la déviation va nous amener au delà de nos capacités. Visiblement, il n'y en a que pour une petite dizaine de kilomètres, en côte. Je décide de faire la route avec ce belge wallon, compagnon de misère. 
Nous mesurons ensemble ce que signifie de transporter de lourds bagages sous la chaleur lourde du sud de l'Italie. Plus la route s'élève, et elle s'élève bougrement, moins il y a d'air. Je n'ai plus d'eau. Mon compagnon me propose une pêche lors d'une nouvelle pause. Je ne veux pas de sucre. Juste de l'eau, de l'eau, de l'eau. Je l'attends, nous reprenons la route qui continue de s'élever et je m'encourage avec le proverbe boursier : "les arbres ne montent pas jusqu'au ciel", appliqué au vélo, ça donne : toute montée a une fin ... et mes optimistes diront toute montée précède une descente. 
Proverbe ou pas, moral ou pas, à l'annonce de la poursuite et du durcissement de la montée, mon compagnon lève le pouce et descend de sa bicyclette. 
La vue plongeante, dont la photo ne donne qu'une faible
idée. C'est beau, mais ça manque un peu d'eau. 
Je ne veux pas couper mon effort et je me dis qu'il me retrouvera un peu plus tard. De fait, après un dernier kilomètre, la descente s'annonce, je vois un marcheur au loin, que je passe évidemment sans peine avant de voir ce que j'attends depuis un petite heure : une fontaine installée là dans le cadre de l'aménagement de la via Francigena.
Forcément, avec un lac au loin, la vue prend plus de sens
"Acqua, acqua, acqua ..." J'entends le pèlerin derrière moi, je lui laisse la place. En fait il est trop épuisé pour se jeter sur l'eau. Il me raconte son espérance de pèlerin, s'humidifie, puis boit enfin avant que je me je jette ma nuque sous la fontaine, mouille mes vêtements et m'abreuve. Mon compagnon d'infortune arrive un peu plus tard. Visiblement, il n'a pas envie de me suivre.

Un doux repos au bord du lac sous une tente
bien montée. Pas si facile, à l'époque des tentes 
à jeter qui se mettent toutes seules comme il faut.
Sauf qu'elles ne rentrent pas dans une sacoche.

 
Je poursuis alors, je sais que j'ai fait le plus dur. D'ailleurs, quelques kilomètres plus tard, tout se conjugue agréablement. Il n'y a plus de grande montée, la chaleur baisse avec le jour, et puis, enfin, au bout de la route, j'aperçois le lac dans sa majesté.



Je croise au petit matin un père et son fils en mode cyclo-camping. Le père m'explique le programme de ses journées pédago-cyclistes. Il ira à Orvieto, mais avant ils ont visité Monticello, Abbadia San Salvatore, autant de noms que je me souviens d'avoir croisé sur les panneaux de signalisation. Quelle chance pour un papa cycliste que d'habiter une terre si riche que l'Italie. Le lendemain, mauvaise surprise : plus de gaz dans la cartouche. Avant de m'en procurer une sur le trajet, je décide 
que c'est un mal pour un bien. 
Après tout, depuis que j'ai franchi la frontière, je n'ai fait que du camping et je ne me suis pas encore payé le  luxe d'un cappuccino/brioche, le petit déjeuner traditionnel italien. Il est tant de s'y mettre, et quelle douceur dans ce paysage apaisé. 
La colazione Cappuccino/brioche
Un vrai petit dèj italien au bord
du lac















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