mercredi 24 août 2016

Les bulles de Viola

Je ne le cacherai pas : ça fait du bien de faire une pause de temps en temps. C'est bien pour ça que je comptais sur Alfredo pour me remettre les idées en place.à force de pédaler sans arrêt, on ne sait plus où l'on habite et avec Alfredo je suis toujours chez moi. Bref, c'est un ami. 
Alfredo, l'été, fait comme beaucoup d'italiens du sud, surtout s'ils ne bossent plus. C'est à dire qu'il va vivre dans sa campagne, une deuxième maison avec un jardin, située à proximité de la sienne, qu'il aménage au fil des ans. Dans cette maison, il y a des eucalyptus, des citronniers, des oliviers, un potager et des cigales. On est pas loin de la mer, pas loin de la ville et l'on profite au mieux du climat exceptionnel des Pouilles. 
Quand Alfredo est en forme, il dit que c'est une sorte de Paradis. Je le voyais avec Viola qui ne se lassait pas des bulles de savon qui voletaient autour d'elle. Alfredo lui disait : " tu vois, Viola, quand les bulles vont de ce côté-ci, de l'est vers l'ouest, le vent amène la fraîcheur, c'est la tramontane. Quand il souffle de l'autre côté, c'est le sirocco, et on a trop chaud." 
Visite incontournable chez le barbier. Là-bas, un
diplôme cycliste me clignait de l’œil, en haut à
gauche du miroir
L'enfant, inattentive aux propos de son professeur de grand'père baignait dans son insouciance. Et plus elle était dans ses bulles, et plus j'étais fasciné. Ainsi le spectacle me rappelait  qu'on était dans un autre monde, sur la terre du sirocco, du vent chaud, des citronniers, des eucalyptus et des cigales bien loin de la Normandie et de son climat délicieux. Moi, j'étais là, en plein milieu. Ce n'est sans doute pas le Paradis, mais Alfredo a raison, ça y ressemble et je me demande comment j'avais pu y venir en vélo.
Il ne s'agissait pas de m'installer à demeure. Même si j'avais décidé d'une pause , dès le début j'avais mon départ en tête. Je ne devais rien perdre de la douceur du repos et des Pouilles. J'ai pu finir le magnifique ouvrage de Paolo Rumiz sur la voie Appienne, acheté à Florence et terminé à San Vito, que j'ai pu remettre à Alfredo, dans cette idée que j'avais eu au cours du chemin pour ne pas trop m'encombrer : prendre un livre, le lire et l'échanger sitôt qu'il est fini. Le cyclo camping interdit le stockage. 
Ciao Alfredo, a presto
Je n'ai pas fait que cela au cours de l'arrêt. Visite chez le barbier, un moment toujours très fort. Pas question que j'aille en Italie sans profiter au moins une fois de ce rare plaisir. Me laissant aller pendant que la lame me caressait la glotte, je regardais en face de moi un petit vélo me faisait de l’œil en haut à gauche du miroir. Le barbier m'a expliqué que c'était son fils, et pas lui qui avait eu ce trophée décoratif. 
Mais en dehors des plaisirs de la plage et du climat, surtout, je me suis baigné dans l'atmosphère du pays, et les couleurs nuancées de cette terre qui me faisaient invariablement penser à une chanson d'Herbert Pagani qui a bercé ma génération. La terre rouge orange, avec toutes les couleurs qui vont du rouge à l'orange et même au delà, les couleurs argiles qui s'effacent ou resplendissent, et qui laissent s'épanouir les oliviers. Tout cela ce sont les Pouilles où je me suis baigné quelques jours avant de partir, salué par Alfredo, sa chère Silvana et ses deux petites filles. 











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